Le sorgho, une céréale vraiment prometteuse ?
Econome en irrigation grâce à ses profondes racines, résistant bien aux parasites et exigeant donc peu de produits phytosanitaires , le sorgho, massivement cultivé en Afrique, apparaît comme la culture miracle pour affronter le réchauffement climatique qui menace l'équilibre de nos latitudes. Les faits sont à nuancer. De paroles d'experts, le sorgho a surtout l'avantage d'être une culture supplémentaire que les agriculteurs pratiquant l'assolement peuvent ajouter à leur panel pour éviter de fatiguer les sols, et limiter leurs risques en diversifiant leur activité.
C'est ce qu'explique Valérie Leguereau. Cette exploitante agricole s'est convertie au sorgho en 2019, l'ajoutant au maïs, au soja, au tournesol et au blé qu'elle cultive historiquement sur ses 450 hectares du Loir-et-Cher. « Le sorgho est une très bonne plante de printemps. Grâce à ses larges feuilles, elle assure un couvert végétal sur les champs qui évite que trop de mauvaises herbes poussent en dessous. Elle nous épargne de lourdes opérations de désherbage, assure une bonne biodiversité du sol et y maintient le CO2 », explique-t-elle.
Peu gourmande en eau
Pour Valérie Leguereau, le sorgho n'a pas vocation à remplacer une autre culture. « Il est complémentaire, précise-t-elle, il ne se substituera pas au maïs, plus riche en sucres. C'est une filière encore trop méconnue, réservée à l'alimentation d'élevage et d'oisellerie. Mais elle pourrait tout à fait se destiner aux humains. On y vient peu à peu, même si les procédés industriels restent à développer. »
En outre, les goûts des consommateurs européens n'y sont pas encore sensibles. En Afrique au contraire, cette farine intéressante, neutre en gluten , est largement consommée sous forme de pain, de porridge ou de pâtes. Le sorgho africain n'est cependant pas le même que celui que l'on cultive en France. « Ni que celui que l'on trouve en Inde, en Argentine ou en Chine », ajoute Martin Gomez, chargé de promotion à la FNPSMS (Fédération nationale de la production des semences de maïs et de sorgho). Ici, nous avons développé des variétés spécifiquement adaptées à nos sols et à nos climats au prix d'années de recherche souligne-t-il, et s'il est moins gourmand en eau que le maïs, le sorgho n'a pas forcément un meilleur rendement, et n'échappe pas pour autant aux sécheresses ravageuses . C'est une plante rentable tant qu'elle ne demande pas trop d'irrigation. »
Encore épargnée par les nuisibles
Selon la FNPSMS, son rendement aurait ainsi baissé de 30 % durant la très sèche année 2022. Certes, au registre de ses qualités, le sorgho n'attire pas les champignons et les parasites, évitant ainsi l'ajout de pesticides et autres intrants coûteux. Mais, là encore, les professionnels ajoutent une nuance.
Dans l'Hexagone, sur les 29 millions d'hectares de surface agricole utile, 60.000 à 90.000 sont cultivés en sorgho, selon les années et le prix des céréales. Si cette surface venait à augmenter drastiquement, rien n'assure que les insectes et les champignons, adaptables par nature, ne finiraient par s'y intéresser. Idem pour les sangliers, qui en fins gourmets pétris de leurs habitudes, préfèrent toujours se goinfrer de semences de maïs…
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