Le nombre de haies dégringole en France, il était urgent que le gouvernement s’attaque au problème
CLIMAT - Dans les villes, les jardins et surtout dans les champs, les haies continuent chaque jour de disparaître à une vitesse impressionnante. Pourtant, elles sont très efficaces pour lutter contre la sécheresse, les inondations et la perte de biodiversité dans les campagnes françaises.
Pour inverser la tendance, le gouvernement a présenté ce vendredi 29 septembre un « pacte » qui se veut rassembleur pour que la France compte autour de 800 000 kilomètres de haies en 2030, soit 50 000 de plus qu’aujourd’hui. « La haie est un symbole fort de la réconciliation possible de tous les acteurs autour des enjeux de la transition écologique », affirme le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau dans une présentation, consultée par l’AFP, du « pacte en faveur de la haie » porté avec sa collègue chargée de la Biodiversité, Sarah El Haïry. Le cabinet de Marc Fesneau remarque que, dans une « société très clivée », la haie a le mérite de « mettre chasseurs, associations de protection de l’environnement, collectivités, agriculteurs autour de la table » : « tout le monde veut de la haie. »
Pourtant depuis 1950, la France a éliminé 70 % de ses haies. Cela représente 1,4 million de kilomètres de végétation détruite, soit l’équivalent de deux allers-retours entre la Terre et la Lune. C’est le résultat des directives d’après guerre et des nombreux remembrements agricoles, périodes au court desquelles les parcelles françaises ont été mises en commun pour former des champs plus grands et gagner en productivité. Les arbustes qui les séparaient ont été arrachés à tour de bras, comme vous pouvez le voir dans la vidéo ci-dessus.
Deux fois plus d’arrachage de haies qu’il y a dix ans
Un déboisement massif… qui se poursuit aujourd’hui. Selon un rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), depuis 2017 la France perd en moyenne 23 500 km de haies par an. Problème : c’est deux fois plus que ce que l’on arrachait dix ans en arrière. Si bien que le CGAAER estime que « l’état des haies françaises est globalement médiocre » et met en garde le gouvernement sur ses choix agricoles.
Car si la haie était autrefois démodée, elle apparaît aujourd’hui comme une solution face à bon nombre de défis posés par le changement climatique, à commencer par les périodes de sécheresse. « La haie permet de retenir l’eau et de la faire pénétrer dans les sols, jusqu’aux nappes phréatiques, plutôt que de la laisser ruisseler sur les terrains et provoquer de l’érosion », indique Luc Abbadie, écologue. Plantées perpendiculairement aux pentes, ces rangées de végétation limitent à la fois les risques de crues et de sécheresse.
« Face aux aléas climatiques de plus en plus intenses et fréquents, les haies et les arbres représentent une vraie solution », indique donc le rapport du CGAAER. Car ces enfilades de végétation réduisent aussi les extrêmes de températures et permettent de stocker du CO2, premier gaz à effet de serre responsable du changement climatique. Autre point essentiel : les haies favorisent la biodiversité. Pourquoi alors continuer de les décimer ?
Passée de mode, la haie va-t-elle faire son retour ?
C’est d’abord une question de mentalité : depuis soixante ans le fait d’arracher les haies est présenté aux agriculteurs comme un signe de modernité et de rentabilité pour leurs parcelles. Or cette image tend à changer dans le monde agricole, justement à cause des effets du changement climatique.
« Ces quatre dernières années, les agriculteurs ont dû faire face à des aléas climatiques de plus en plus intenses. Ils sont nombreux à se rendre compte que les haies sont une partie de la solution », constate Sylvie Monier, agronome et directrice de la Mission haies Auvergne-Rhône-Alpes. Difficile en effet de passer à côté de certains constats : « on voit par exemple dans les vignes que les haies sont efficaces pour couper les vents caniculaires du sud, qui viennent brûler les feuillages des cultures ».
« Certes les haies diminuent le rendement car elles occupent de la place sur les parcelles mais comme elles protègent contre les évènements climatiques les plus durs on gagne en sécurité et stabilité des récoltes, c’est un calcul à faire », explique Luc Abbadie.
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